Éditorial
J. Lambert, F. - X. Lavenne, L. Pieropan
Texte
Pour clore l’année 2019, c’est au milieu des livres que Francophonie vivante vous emmène. Sujet à la fois d’introspection et de partage, le livre occupe dans notre vie une place importante.
N’en déplaise aux chantres de la dématérialisation à tout va, celui-ci n’est pas près de disparaître : comment remplacer l’expérience de la lecture, le toucher du papier, son odeur, surtout si le volume est ancien, la présence de ses quelques imperfections (page écornée ou manquante, petit défaut d’impression, reliure un peu lâche…) qui lui confère son « aura », ainsi que le dirait Walter Benjamin ? Sans compter que, du lecteur au bibliomane, il n’est qu’un pas, très vite franchi.
Bien avant qu’il devienne un objet de consommation, tel que nous le connaissons depuis la seconde moitié du XIXe siècle, le livre se distinguait d’abord par sa rareté et sa cherté. De l’ex libris à la reliure personnalisée, celui-ci a toujours fait l’objet de soins particuliers, que l’on retrouve encore de nos jours à travers les œuvres de bibliophilie.
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Confié à Géraldine David et à Perrine Estienne, de la Bibliotheca Wittockiana, ce dossier se propose d’explorer en profondeur le livre d’art et les arts du livre selon un parcours progressif et cohérent. S’ouvrant sur quelques réflexions historiques et théoriques, il se poursuit en interrogeant les lieux actuels – institutions et marchés – où se déploie le livre d’artiste, avant d’aborder quelques démarches artistiques individuelles, anciennes et contemporaines (Pol Bury, Ilse Garnier, Yves Namur, Dimitri Vazemsky, Jean de Boschère, Yannick Haenel…).
Dans le sillage de ce dossier, la rubrique « La littérature sort de la page » met en lumière le travail de Zoé Suliko Tabourdiot dont les mises en voix viennent apporter une épaisseur supplémentaire aux textes auxquels elles s’attaquent.
Pour leur part, les « Sillons francophones » vous mèneront de la « pas si sage Héloïse » de Charles Plisnier (K. Rondou) aux rivalités littéraires bretonnes (P. Guérande), en passant par la francophonie (J.-N. De Surmont), l’apprentissage du français par les nouveaux arrivants au Québec (C. Forget) et le vingt-cinquième anniversaire des Cahiers d’El Jadida (M. Jmahri).
Nous reviendrons également sur les archives (thématique de notre précédent dossier) comme garantes de notre démocratie (M.-L. Dubois) et voyagerons au cœur des langues, du Québec (C. Forget) à la Méditerranée (D. Keraani), en transitant par la France et la nouvelle édition du Petit Larousse (L. Sommant).
Pour terminer, nous évoquerons l’intense « Vie culturelle » francophone de ces derniers mois, en commençant par deux hommages : l’un à l’écrivain Yun Sun Limet (M. Watthee-Delmotte), décédée en juin 2019 ; l’autre à Abdelkébir Khatibi (D. Keraani), dont on a célébré le dixième anniversaire de la mort en 2019.
Suivront nos traditionnelles notes de lecture (J. Lambert, P. Leuckx & P. Schroven) – il y sera question, notamment, de Dominique Grandmont, d’Antoine Wauters, de Rony Demaeseneer, de Marie Noël, de Vincent Poth, de Myriam Watthee-Delmotte… –, et le compte rendu de l’exposition REVOLUTIONS. Records and Rebels (1966-1970) à l’ING Art Center.
Enfin, un entretien des frères Dardenne, invités à une masterclass au festival méditerranéen Manarat (Tunisie), ainsi qu’un aperçu des prix littéraires 2019 de la Fédération Wallonie-Bruxelles viendront conclure cette livraison.
Puisse ce numéro de Francophonie vivante consacré à la matérialité et à la dimension artistique du livre, ainsi qu’à la vitalité belge et mondiale de l’expression en langue française, réjouir les lecteurs inconditionnels et insuffler à ceux-ci l’envie de transmettre un peu de leur passion aux jeunes générations.
Aujourd’hui plus que jamais, ce passage de témoin n’a-t-il pas en effet besoin d’être réactivé dans la complicité des liens intergénérationnels ?
© J. Lambert, F.-X. Lavenne, L. Pieropan, revue Francophonie vivante, 2-2019, Bruxelles