© 2015, Josse Goffin, Regard à gauche

Méduse comme opérateur de la fiction: Treasures from the Wreck of the Unbelievable de Damien Hirst, Palazzo Grassi et Punta della Dogana, Venise, 2017

Éliane Chiron

Texte

LE SECRET

Deux ans après, nous en trouvons encore des traces sur internet, sur Youtube notamment, de cet événement de 2017 qui a pris de court, « estomaqué », parfois scandalisé, le monde de l’art. Les Treasures from the Wreck of the Unbelievable de Damien Hirst se sont déployés, sur quelque cinq mille mètres carrés, dans les deux sites vénitiens du collectionneur François Pinault : la Punta della Dogana et le Palazzo Grassi au bord du Grand Canal, un peu avant la Biennale d’art contemporain, au point de quasiment l’éclipser.
Du 8 avril au 3 décembre 2017, ces « Trésors de l’Épave de l’Incroyable » offrent à la vue des visiteurs l’immense collection hétéroclite d’œuvres trouvées dans l’épave d’un bateau, l’Apistos (« incroyable » en grec), coulé près des anciens ports commerciaux de l’Azanie, sur la côte africaine de l’Océan indien, il y a deux mille ans. L’esclave romain affranchi devenu ce fabuleux collectionneur se nommait Amotan II, autrement dit l’anagramme de « I am a fiction ». Mais cela, on l’apprendra plus tard. Comme le découvriront, avec retard, les très riches invités du vernissage, en lisant sur place les cartels XX.
Cette exposition de l’artiste britannique Damien Hirst est donc une fiction. Sauf que la plupart des visiteurs, non informés, croient sans peine que les coraux et concrétions marines qui recouvrent abondamment la centaine d’œuvres, dont une grande part monumentales, témoignent de leur long séjour en mer. Sauf que dans l’entrée de la Punta della Dogana, dans des caissons lumineux, des films documentaires, tournés avec des budgets colossaux, font croire à l’authentique campagne de plongée qui aurait été organisée en 2008 pour remonter ces statues monumentales du fond de l’Océan. Sauf que pas une de ces statues, pas un de ces objets, pas un de ces fragments, n’est issu de la soi-disant épave dont on voit la maquette dans le Palazzo Grassi avec l’emplacement précis où chaque pièce aurait été retrouvée.
Sauf, enfin, que Damien Hirst a tout réalisé à grands frais, pendant dix ans, de 2008 à 2017, dans le plus grand secret, soutenu par son collectionneur François Pinault qui, lui aussi sans compter, a fait transporter, a assuré et fait installer l’ensemble à Venise, lieu de tous les commerces maritimes et de tous les défis. Certes, puisque toute cette saga est consultable sur internet, les faits sont bien documentés pour qui veut être parfaitement informé. Pourtant, ces faits, qui interrogent ici le faire de l’artiste, méritent une analyse au-delà de l’événement et des réactions des critiques. On observera comment le concept de fiction dérive directement du faire et du façonnage ; puis comment l’artiste feint le face-à-face avec Méduse, à partir de celle qui est reproduite partout, en malachite, dans le Palazzo Grassi ; enfin comment cette figure de Méduse aurait le pouvoir de faire et défaire l’artiste et serait un opérateur essentiel, en fait le cœur battant de l’exposition et de ses enjeux les plus intimes.

 

INVENTER, FAIRE ET FEINDRE:
COMMENT FAÇONNER UN TRÉSOR

Damien Hirst, donc, aurait trouvé au fond de la mer un trésor. Or on le sait, trouver signifie « inventer ». Qui trouve un trésor ou un site archéologique en est, dans le langage juridique, « l’inventeur », du latin invenire, qui signifie trouver, selon tous les dictionnaires. Inventer suppose de trouver le lieu où chercher le trésor, de savoir où fouiller pour qu’apparaisse ce qui existait déjà mais n’était pas encore connu, avait été oublié, avait disparu. Tel le Laocoon au XVIe siècle. Le terme, également présent dans la liturgie, est conservé dans l’expression « l’invention de la Sainte-Croix » (1270) XX. Inventer s’oppose à imiter, copier, certes. Mais on voit que le terme est ambigu : il faut inventer quelque chose pour le trouver. Ou bien le trouver pour en être l’inventeur. Nous tournons en rond.
Dans ce cas précis, dans cette invention qui oscille d’un côté ou de l’autre en ruban de Mœbius, qu’est-ce que faire ? Œuvrer avec une matière première déjà là, enfouie dans les abysses de l’Océan Indien jusqu’à ce qu’on l’ait trouvée. Comme le Laocoon, trouvé en 1506, était enfoui dans le sol de Rome. Dans le cas de Hirst, travailler « à façon » un matériau archéologique, lui donner une forme, fait passer ce matériau dans le domaine artistique. De même les photos de Paris par Eugène Atget sont passées, au MOMA de New-York, du département documentaire de la photographie à son département artistique. Il s’agit de remodeler un matériau, de changer radicalement de point de vue, de modifier profondément la façon de voir. Il y a un substantif pour désigner cette opération : le façonnage. Quelle est ici la matière première ? Les « trésors » (ainsi nommés dans le titre de l’exposition de Hirst), la cargaison fabuleuse trouvée dans l’épave, « inventée » par Damien Hirst qui l’expose comme son œuvre propre. C’est ce que nous disent les explications affichées à l’entrée de la Punta della Dogana. On aurait eu affaire à une démarche conceptuelle, à une sorte de trésor « ready-made », Juridiquement, il en aurait eu le droit.
Sauf que ce trésor soi-disant trouvé, exhumé, a été entièrement fabriqué sous ses ordres, inventé par l’artiste et réalisé par lui-même et sa centaine d’assistants, sans doute aussi de la main-d’œuvre chinoise. D’ailleurs parfois les cartels indiquent : made in China. En fait, il a dissocié l’usage courant des verbes « trouver » et « inventer », brouillé le sens de l’étymologie. Et c’est cela qui a fait scandale. Témoin quelque part dans la Punta della Dogana, une statue de l’artiste lui-même en vieil homme (The collector with friend), en bronze, couvert de concrétions marines comme s’il avait passé deux mille ans au fond des eaux de l’Océan indien, tenant par la main un Mickey avec lequel il aurait séjourné tout ce temps.
Et là, ce qu’il façonne serait la figure de l’artiste en éternel enfant, mais à cette enfance selon Bachelard qui n’appartient à aucun temps historique ni à aucun présent. Hirst invente en faisant semblant de fouiller concrètement, il opère un retournement de point de vue. Le matériau qu’il façonne est virtuel, enfoui, certes, mais en lui, comme le ferait le narrateur proustien de La Recherche ou le héros des Cahiers de Malte Laurids Brigge.

En fait, Hirst a l’habitude de procéder par façonnage. En 1991, il avait œuvré en mettant pour la première fois dans du formol cette « matière première » qu’était un Requin, pêché à sa demande par un pêcheur australien, et plus tard une Mother and child divided (1993). Le requin, simplement immergé dans du formol exposé dans un aquarium et nommé The Physical Impossibility of Death in the Mind of Someone Living [L’impossibilité physique de la mort dans l’esprit d’un vivant], a dû, au bout de quelques années, être presque totalement remplacé, car le formol n’avait pas suffisamment imprégné l’animal dont la chair, s’étant diffusée en lui, l’avait irrémédiablement abîmé. Seule la peau a été conservée pour mouler un corps d’animal artificiellement reconstitué à la manière des taxidermistes.
Si nous sommes maintenant attentifs à la double étymologie du façonnage, nous remarquons que facere (faire) le dispute à égalité avec fingere (feindre) et conduit à la fiction, mais encore à « faction », à l’idée d’un acte « factieux », ce dont relèverait cette formidable exposition de Venise, aux dires de certains critiques indignés.
Envisagé du côté de « feindre », le travail « à façon » ne suppose aucun effort physique, il ne dérive pas d’un labor (où ce qui serait mis en avant relèverait du laborieux). En revanche, utiliser le travail de la nature et celui du temps, avec l’oxydation et la croissance des coraux, ressortit davantage à l’œuvre au sens d’opus où ce qui domine est le travail de l’esprit. Au sens où l’effort que cela a coûté n’est pas visible, et est de ce fait annulé. Au sens où, au XVIIIe siècle, une chose était faite « avec art » quand elle ne montrait pas l’effort qu’elle avait coûté. Au sens aussi où l’artiste envisage que le requin remplacé en 2005 est aussi authentique que le premier. Cela suscite un débat : le risque est que les historiens de l’art ne considèrent pas qu’il s’agit de la même œuvre. Damien Hirst l’admet :
Les artistes et les conservateurs n’ont pas la même conception de ce qui est important : l’œuvre originale ou l’intention d’origine. Je viens du milieu de l’art conceptuel, donc pour moi c’est l’intention qui compte. C’est la même œuvre. Mais la question n’est pas près d’être tranchée XX.

Et pourtant nous devrions avoir en tête le mythe grec des Argonautes dans lequel le navire Argos, tant de fois réparé au cours de la traversée, de sorte qu’aucun fragment de départ ne subsiste à la fin, est bien toujours le même car il porte le même nom. En effet le requin de Hirst appartient sans doute possible à la génération des Dents de la mer (dont le premier film de ce nom est daté de 1975) et non à la suivante, celle de 2005. C’est la date de sa conception qui compte et le titre inchangé de l’œuvre. L’identification d’une œuvre d’art a des choses en commun avec la formation de nos identités individuelles : le vivant se régénère et se renouvelle tout au long de la vie, les cellules qui constituent notre être à l’âge de 50 ans n’étaient, pour la plupart d’entre elles, pas présentes dans notre organisme quand nous étions adolescents – sans parler de l’échange standard d’organes entiers, cœur, reins et poumons. Ce qui ne nous empêche pas de porter le même nom, qui va définir notre identité civile et pénale. Nous répondons à l’appel de notre nom. La dimension conceptuelle de l’art rencontre des propriétés biologiques du vivant. Alors que les cellules différenciées du système nerveux central qui se forment dans l’embryon, ainsi que celles des muscles et du cœur, ne se divisent pas, les cellules souches se divisent pour régénérer ces tissus lorsqu’ils sont endommagés. Il en est de même pour cette œuvre de Damien Hirst, qui l’a rendu célèbre : The Physical Impossibility of Death in the Mind of Someone Living. Une chose est sûre : ce titre témoigne de la fascination récurrente de Damien Hirst pour la mort. Il n’est donc pas étonnant que Méduse y participe.

 

COMMENT FEINDRE LE FACE-À-FACE OU LE VIOL DE MÉDUSE

Méduse existe dans le Palazzo Grassi et à la Punta della Dogana, en trois versions faites de matériaux différents : malachite, quartz, or et argent. Selon le récit qu’en fait Ovide, Méduse réside aux confins de la terre et de la mer où Persée doit aller la trouver pour la décapiter et rapporter sa tête afin de pouvoir épouser Andromède ; ce qui convient au lieu choisi pour figurer dans l’exposition de Hirst : à Venise, bordée par l’eau du grand canal. On a dit que cette Méduse, dont on connaît surtout celle qui est reproduite partout, en malachite verte, a été copiée sur celle du Caravage. Certes, elle lui ressemble, sa bouche s’ouvre aussi dans un cri, mais la Méduse du Caravage est peinte sur un support de toile bombée comme un bouclier, elle est vraiment ce qu’en dit la Mythologie : un masque. Elle nous fait face, sauf que, par précaution de la part du peintre, ses yeux exorbités, tournés sur le côté, ne peuvent jamais rencontrer les nôtres. C’est que Caravage est peintre et Hirst, sculpteur. Et à la différence du groupe de Persée tenant la tête de Méduse par Benvenuto Cellini (1545), sous la Loggia dei Lanzi, sur la Piazza della Signoria à Florence, qui est en bronze, la Méduse en malachite de Hirst est en pierre taillée.

À 472 ans d’écart, toutes les deux sont belles. Comme l’était Méduse avant d’être violée par Poséidon dans le temple d’Artémis. Leurs faces ne sont pas celles de monstres, mis à part la chevelure de serpents et, s’échappant du cou tranché, le sang épais comme des cheveux pour l’une à Florence, les énormes vaisseaux sanguins pour l’autre à Venise. Mais, alors que du cou de la Méduse du Caravage coule à flots un sang bien rouge, qui pourrait nous éclabousser, rien de tel dans les deux sculptures ; en revanche une autre violence, aussi insoutenable, se montre, à Florence en pleine place publique et à Venise comme emblème de l’exposition : d’évidence, il s’agit d’un viol. La tête de Méduse en malachite est couchée sur le côté (exactement comme la Muse endormie de Rodin, dont ce serait l’antithèse et un rappel inversé). À Venise, à travers les veines de la pierre, Méduse crie car elle est en train d’être violée. Elle subit le viol qui la fera Méduse par la transformation de sa belle chevelure en enchevêtrement de serpents. C’est ainsi qu’elle est punie (on se demande bien pourquoi). Un pendant à ce cri muet : celui du Laocoon qui a donné lieu au fameux débat, d’Horace à Lessing, à propos d’ut pictura poesis. Le Laocoon de pierre crie en sculpture mais les règles de la poésie l’interdisent, peinture et poésie ne peuvent se confondre.

Il n’est pas indifférent que la Méduse de Hirst pousse elle aussi des cris. Au départ, Méduse est Gorgo, la seule des trois Gorgones à être mortelle. Or, nous dit Frontisi-Ducroux, le nom antérieur gorgoneion, qui désigne cette face grimaçante, exposée partout à la vue des Grecs, n’est pas un nom visuel.
L’adjectif parallèle Gorgos caractérise un regard farouche. Mais cet adjectif, de formation secondaire, dérive lui-même du nom de Gorgo et de ses pouvoirs terrifiants. Le nom de cette vision effroyable est un terme essentiellement auditif […] proche parent des gargouillements, grognements et autres grouillements, le nom des Gorgones évoque […] les bruits divers qui escortent ces créatures mythiques, et en particulier […] au moment de la mort de Méduse : gargouillis du sang jaillissant de l’artère tranchée, grincement de dents des sœurs endeuillées, gémissements plaintifs et grondements furieux […] sifflements des serpents de leurs chevelures […] Un nom bruyant donc, suggestif de […] son gosier coupé XX.
Ce qui s’accorde à ce qui naît de ce viol par cette gorge ouverte: le cheval Pégase et le géant Chrysaor XX.

De fait, quand nous tournons autour de la sculpture de malachite, que nous avons devant nous ce qui est à l’arrière : un nœud de serpents, nous, les visiteurs du Palais Grassi, en 2017, en sommes plus effrayés que de la face de Méduse de l‘autre côté de la tête. Nous voyons les serpents tels qu’il font l’objet d’une description rapportée par Frontisi-Ducroux : « ployant la tête, dardant la langue, heurtant leurs mâchoires furieuses et lançant des regards sauvages XX. » Nous pourrions presque entendre les sifflements de leurs gueules grand ouvertes, et nous serions près de reculer si nous n’étions pas fascinés, au plus près, par la minutie du travail de chaque détail rendant si vivante chaque veine de la malachite. Et si Méduse n’était pas enfermée dans un parallélépipède de verre.

 
[ V. photo 1, onglet Images en haut de page.] Damien Hirst, The Severed Head of Medusa, 2008, Malachite, 18 x 49,6 x 52 cm. / Photo É. Chiron, Palazzo Grassi, octobre 2017.



À l’évidence, Hirst a entouré sa Méduse d’une connaissance approfondie de la Mythologie et l’a située dans une prestigieuse lignée de sculpteurs. Il ne pouvait prévoir que le moment où elle est apparue au public n’était pas indifférent puisque le 5 octobre 2017, le New York Times publiait un article sur Harvey Weinstein, accusé de harcèlement sexuel sur plusieurs femmes. Quelques jours plus tard, le producteur de Hollywood était à nouveau mis en cause par le New Yorker pour des faits d’agressions sexuelles et de viols. Cette série de révélations déclenchèrent une déflagration mondiale quand l’actrice Alyssa Milano décida de lancer une campagne de témoignages sur les réseaux sociaux avec un mot clef : « Me Too », et le mouvement a essaimé, en France avec « Balance ton porc ».

Simple coïncidence, que personne n’a relevée. Nous avons mis du temps à voir dans cette Méduse en malachite une trop belle femme en train d’être violée, tant nous avons à l’esprit que Méduse est d’abord, nous a-t-on dit, un monstre terrifiant au regard qui tue XX. J’ai dû regarder à nouveau les photographies que j’en avais prises deux ans plus tôt dans le Palazzo Grassi, pour écrire cet article, car à ce moment-là, sur place, face à elle, j’étais trop émue de la voir, elle, Méduse, pour y penser. De même que je suis bouleversée chaque fois que j’en vois l’image, comme si c’était à chaque fois la vraie. Mais Françoise Frontisi-Ducroux nous fournit les arguments les plus sérieusement scientifiques qu’elle seule parmi les hellénistes de haut niveau est allée chercher dans les textes anciens.

Reprenons certains traits saillants de l’histoire de Méduse, notés chez tous les auteurs : elle est la plus horrible des figures féminines de la mort en Grèce ancienne, où la mort est au féminin, inséparable de la figure de la jeune fille XX. En effet, le pouvoir mortel du regard de Méduse est rendu possible par la réciprocité, indissociable du rayon visuel des anciens, où voir est l’équivalent d’être vu. Platon précise :

Quand nous regardons l’œil de quelqu’un qui est en face de nous, notre visage se réfléchit dans ce qu’on appelle la pupille (koré, la fillette) comme dans un miroir : celui qui y regarde y voit son image […] je me vois en action de voyance, objectivé dans l’œil d’autrui, projeté et reflété dans cet œil, comme en un miroir me réfléchissant à mes propres yeux XX.

La Méduse de Hirst, qui ne se calque pas sur le masque archaïque bestial et monstrueux, rejoint un modèle postérieur au milieu du Ve siècle, qui le « féminise complètement et donne naissance à la figure d’une Méduse qui fascine désormais par une beauté aussi insoutenable que sa laideur initiale XX. » Sauf que, nous dit Françoise Frontisi-Ducroux, parmi les figurations sur les vases à boire notamment, il n’y a pas de face-à-face possible entre une femme et un homme.
La frontalité, donc, régit le face-à-face. Elle implique interpellation et détournement XX. Il y a bien des contre-visages : les satyres d’un côté, la Gorgone de l’autre ; mais nulle symétrie entre eux. Le satyre, « figure bestiale de la trangression, incarne certains fantasmes masculins XX », alors que les femmes dérivent toutes de Pandora que Zeus a demandé à Héphaïstos de modeler, pour le malheur des hommes XX !

Cherchons les cas de frontalité de visages de femmes, sachant qu’elles seront inévitablement regardées par des hommes, car elles décorent les vases à vin utilisés dans les banquets, plutôt que les coffres à bijoux XX. On remarque que pour figurer les amours des dieux (ou déesses) et des mortels (ou mortelles), les scènes d’enlèvements de jeunes filles sont fréquentes et « dans tous les cas, c’est le mâle qui l’emporte XX». Ces scènes de violence, même si elles représentent souvent le rapt plutôt que le viol, montrent souvent le visage de face d’une autre femme effrayée qui s’enfuit. « Toutes ces images mettent en scène l’intrusion de la violence masculine dans le monde des vierges et la panique qu’elle suscite XX. » S’adressant aux hommes, « le face-à-face entre l’image et son spectateur […] met en évidence […] l’absence de réciprocité visuelle et l’inégalité de cette relation : elle donne à voir la femme à la merci de l’homme, la femme à prendre, à posséder, à violer XX ».

Il y a aussi le motif du sommeil, état dans lequel (outre les barbares, les enfants et les esclaves), est représentée la femme, car cet état lui convient, « il sert à illustrer sa passivité « naturelle », son indolence, voire sa paresse XX». Les scènes de passivité des femmes ou des ménades utilisent la frontalité de leur visage et parfois de leur corps à des fins érotiques, la femme passive étant offerte au fantasme masculin XX. L’amazone meurt de face sur les marges de l’image, en doublet monstrueux du guerrier, et non pas son pendant et son égale XX. En bref, « appliquée à un visage féminin, la frontalité construit le plus souvent un faux face-à-face entre un visage de femme et un regard masculin XX, à qui s’adresse toute image.
Il est aisé de comprendre que dans la Grèce ancienne, le face-à-face entre un homme et une femme est impossible. Lorsqu’il a lieu, il ne peut s’agir que de Méduse, ce monstre terrifiant, qui tue quiconque croise son regard.

La « survivance » singulièrement vivace de Méduse en image peut se comprendre par son statut particulier, ambigu, en Grèce ancienne. En premier lieu l’impossibilité de l’aborder par une description précise.
« En fixant les traits stéréotypés de Gorgo, en donnant une figure au néant et à l’effroi qu’il suscite, en projetant sous les yeux de leur public ce “contre-visageˮ, les artistes grecs travaillent à exorciser la peur de la mort XX ». C’est bien le cas dans cette exposition. À ceci près que Hirst la multiplie par trois pour mieux la vaincre.
Pourtant, on n’en a jamais fini avec Méduse. En atteste une fascination qui ne faiblit pas. La mienne pour commencer. Il fallait l’exhumer comme un trésor enfoui. Que fallait-il trouver au juste ? Façonner encore ? Une relation intime avec elle. C’est ce qu’ont éprouvé les critiques admiratifs, puisque sur le site Le Temps, par exemple, est écrit le 10 novembre 2017 : « Vous avez bientôt un week-end de libre ? Franchement n’hésitez pas, l’expérience est à vivre jusqu’au 3 décembre XX. »

 

EST-CE MÉDUSE QUI « FAIT L’ARTISTE » OU LE « DÉFAIT » ?

Puisque Méduse n’est jamais décrite, qu’elle est indescriptible, l’artiste peut la figurer comme il veut. En tant qu’elle est toute image, elle est pure fiction. Certes, nous pourrions penser que le plus médusant, dans cette histoire de L’Incroyable, est le miroir que nous tend l’énumération des sommes dépensées et la valeur marchande des œuvres, dont certaines ont été aussitôt vendues. Nous pourrions nous en tenir à ce que pensent certains théoriciens de l’art : qu’aujourd’hui le monde de l’art se résume à une affaire de marché. Qu’on en juge : Hirst a confié à la BBC avoir dépensé plus de 50 millions de livres (58 millions d’euros) ; selon les pièces, les prix vont de 500 000 à 5 millions de dollars, La Tête de Méduse en malachite vaudrait 4 millions de dollars. Nous pourrions nous contenter du décompte de ces sommes faramineuses, sachant que Hirst, qui est sculpteur et travaille avec une équipe d’une centaine de personnes, applique ici la règle convenue du marché contemporain qui veut que chaque œuvre qui n’est pas strictement autographique (une estampe, l’impression d’une image numérique, ou une sculpture par exemple) peut donner lieu à trois exemplaires plus deux exemplaires d’artiste. S’il vend les trois exemplaires de la Méduse, le total « fait » douze millions de dollars. Pourtant, Hirst affirme sans ambiguïté que si le prix d’une œuvre est très important, l’art ne se réduit pas à un échange commercial. Témoin cette interview de la critique Aurélie Raya :

- Vous êtes un des artistes les plus riches du monde. Êtes-vous d’accord avec cette phrase d’Andy Warhol, “Good business is the best art” ?
- Je ne sais pas. L’argent complique la situation. Vous devez gagner votre vie en créant. Mais quand j’en ai empoché beaucoup, là c’est devenu effrayant. Il faut s’assurer en permanence que l’art prime. Enfin, vous devez essayer. Si les œuvres sont nazes et que l’argent coule à flots, c’est grave XX.

Si nous considérons les douze millions de dollars que valent les trois exemplaires de la Méduse en malachite verte, comment pourrions-nous affirmer que dans cette œuvre, c’est la valeur de l’art qui prévaut ? Sachant que cette valeur est partagée entre valeur de culte et valeur d’exposition ?
Il est évident que l’art est impossible à définir. Il est évident depuis Duchamp que ce sont les regardeurs qui font les tableaux. À cet égard l’émotion (y compris la mienne, en tant que critique, chercheur et artiste) éprouvée devant une œuvre est déjà un critère. La reconnaissance par le monde de l’art en est une autre. Considérons en outre qu’une œuvre d’art doit contenir, concentrer en elle la totalité du temps de l’histoire du genre dont elle relève (ce qui est d’une grande difficulté quand on réalise une œuvre et exige une aussi grande concentration de l’esprit XX). Considérons seulement ici, à côté de l’ensemble de cet article et d’autres encore à venir sur cette œuvre, que nous pouvons la mettre en relation avec son sens profond dans la Mythologie.

Par exemple, pourquoi Méduse est-elle verte ? Sans doute en référence à Ulysse dans L’Odyssée, qui s’écrie : « la peur verte me saisit à l’idée que la noble Perséphone pourrait m’envoyer la tête de Gorgo, ce monstre terrifiant XX». Aussitôt Ulysse fait demi-tour XX. La «peur verte» d’Ulysse se retrouverait dans l’expression : « vert de peur ». Et pourquoi deux parmi les trois versions de Méduse sont-elles en pierres véritables (malachite et quartz transparent) et non pas en résine comme nombre d’autres œuvres de l’exposition ? Parce que l’artiste a inversé les rôles et l’a changée, elle, Méduse, en pierre semi-précieuse, autrement dit, il a endossé le rôle de Méduse qui change en pierre quiconque la regarde dans les yeux. Et pourquoi l’autre version est-elle en or et argent, matériaux cotés en bourse ? Parce que la valeur de l’art excède la cote élevée du seul poids de ces matériaux.

Une critique s’en étonne : Ce qui est extrêmement troublant dans l’expo de l’artiste britannique n’est pas tant le caractère d’erzatz des sculptures inauthentiques (qui a pourtant manifestement échappé à quelques visiteurs) que celui de certains de leurs matériaux – lapis-lazuli, émeraude, malachite, jade – dont on jurerait qu’ils sont de la résine ou du plastique XX.

Pourtant, il suffit de se rappeler cette autre filiation : le célèbre ouvrage de Huysmans : À Rebours, paru en 1884, où des Esseintes se fait livrer à grands frais de vraies plantes exotiques ayant la particularité de paraître artificielles : « Après les fleurs factices singeant les véritables fleurs, il voulait des fleurs naturelles imitant des fleurs fausses XX. » « Une fois seul, il regarda cette marée de végétaux qui déferlait dans son vestibule […] son but était atteint […] aucune ne semblait réelle ; l’étoffe, le papier, la porcelaine, le métal, paraissaient avoir été prêtés par l’homme pour lui permettre de créer ses monstres à la nature XX. » Et que recopiaient ces fleurs ? « les membranes intérieures des animaux », elles empruntaient « les vivaces teintes de leurs chairs en pourriture, les magnifiques hideurs de leurs gangrènes XX. » Il conclut enfin : « décidément, par le temps qui court, les horticulteurs sont les seuls et vrais artistes XX. »

Il y a dans cet ouvrage, qui a inspiré Duchamp, toute la fascination pour le faux, pour la fiction en tant qu’invention d’une intensification du réel, à travers l’étalage incommensurable du monstrueux, un monde où tout se mélange. Dans l’exposition de Hirst, le mélange de l’art de plusieurs époques y compris la nôtre, relèverait également de ce monstrueux présentifié par Méduse. Il y a par exemple un Bouddha en jade, des bustes égyptiens en marbre de Carrare. Bien plus, « achevant de brouiller les frontières entre les époques, les civilisations, les croyances de toutes sortes, la haute et la basse culture, le réel et la fiction, les cartels mêlent mentions sérieuses et fantaisistes XX. » Que dire, parmi la centaine d’œuvres de grande taille de l’exposition, de la présence de la pop star Pharrell Williams reconnaissable dans ce Unknown Pharaon en marbre de Carrare, à la Punta della Dogana, en granit bleu, or et agate blanche ; au Palazzo Grassi, de Rihanna en marbre rouge, de Kate Moss en déesse Hathor, de la top-modèle et compagne de l’artiste reconnaissable ailleurs, ou encore d’un Elephant Man, dont la peau épaisse, noire et craquelée, présente un visage défiguré par les coraux ?

Peu après être entrés dans la Punta della Dogana, dès la première salle, nous tombons sur un colossal calendrier aztèque censé être en pierre comme celui du musée anthropologique de Mexico, alors qu’il est ici en bronze. Plus loin, le Bouclier d’Achille, un Mickey recouvert de coquillages côtoyant une coquille de bénitier géant en bronze qui est un comble de l’artifice imitant la nature. Dans ce bric-à-brac archéologique qui mêle toutes les époques, c’est toute une culture hétéroclite, savante et enfantine, qui défile, défiant toutes les catégories. Alors comment est-il possible de seulement poser la question de l’authenticité des œuvres, notamment de ce calendrier aztèque, en ces termes :

De toutes les façons, même si la copie est parfaite, on peut déjà se demander comment un collectionneur vivant à Antioche à la fin du premier siècle de notre ère aurait pu se procurer un objet provenant d’un peuple vivant de l’autre côté de l’Atlantique XX.

Sauf que la logique et les lois de la création artistique n’ont jamais été celles de l’histoire de l’art XX. De fait, c’est tout cet ensemble de plusieurs centaines de pièces grandes et petites, qui expose l’équivalent de ce qui est monstrueux dans l’unique tête de Méduse : le mélange de toutes les catégories, autrement dit le chaos, impossible en effet à regarder en face. Pourtant, « la mort, dans son aspect d’épouvante, comme puissance de terreur exprimant l’indicible et l’impensable, l’altérité radicale, c’est une figure féminine qui en assume l’horreur XX. »
Soit. Mais outre le regard de Gorgo, « sa grimace est liée à la fureur guerrière, à la puissance de mort qui irradie de la personne du combattant à la guerre. » La « fulgurance de son regard » se conjugue avec l’éclat du bronze, le fracas des armes, la fougue et le hennissement des chevaux. « La bouche du monstre, distendue, évoque en sa béance le formidable cri de guerre d’Achille XX ». Est-ce que la bouche ouverte de la Méduse en malachite, qui occupe en pleine page la première de couverture du catalogue, évoque un tel cri de guerre ? Sans doute, mais que risque l’artiste ? Celui d’avoir l’air de « faire l’artiste » sans en être un. D’avoir l’air de tout sacrifier à la valeur d’exposition qui prime à notre époque, de négliger la valeur de culte de l’art. Une fois n’est rien, dans le premier cas ; une fois est tout, dans le second. Remarquons pourtant que l’artiste y retourne à l’envers tous les risques car il est lui-même devenu Méduse. De même, celle de Cellini à Florence qui ressemble trait pour trait à Persée, qui en brandit la tête à bout de bras, l’artiste étant à la fois l’un et l’autre, allant de l’un à l’autre, entre « se faire Méduse » et être « façonné » par son pouvoir. Et quand, à Venise, nous nous trouvons nez à nez avec le grouillement des serpents, c’est la puissance de la sculpture qui nous fascine, et nous éprouvons que, de cette Méduse, certes victime, l’artiste a « fait » aussi une guerrière.

Et si nous avons en tête l’ensemble de l’exposition, il y a bien la figuration réaliste d’un viol effrayant, d’une jeune fille hurlant, d’une vierge, par le Minotaure, grandeur nature, en granit noir ; mais aussi à l’inverse, immenses, impressionnantes, toujours dans les vastes espaces de la Punta della Dogana, deux belles guerrières domptant des monstres : The Warrior and the Bear en bronze, de plus de 7 mètres de haut ; Hydra and Kali en bronze, de plus de 6 mètres de haut. Par ailleurs n’oublions pas que chaque Méduse dont on dit qu’elles sont trois, mais en fait, elles sont quatre avec celle censée être retrouvée au fond de l’Océan, cette fois en bronze, à peine reconnaissable, très abîmée, les serpents gisant autour d’elle en morceaux, un arbre de corail poussant sur son « cadavre » : en fait un flot de sang inversé en train de se pétrifier. Chacune ayant le même titre : The Severed Head of Medusa. Ce qui laisserait entendre que toutes sont authentiques, ou bien qu’aucune ne l’est.

Est-ce alors la fonction ludique de l’art, ou sa fonction rituelle, qui prédomine ? Nous pouvons envisager l’idée que le prix des trois exemplaires de la Méduse en malachite (la seule dont le prix a été divulgué) lui procure une valeur rituelle et cultuelle.
S’agirait-il d’un Potlatch, ce pouvoir suprême de perdre en surenchérissant sur un rival, étudié par Marcel Mauss, la possession de richesses en tant que pouvoir de perdre étant valorisée au plus haut point, comme on sait, par Georges Bataille? Nous sommes bien dans l’hubris qui a le pouvoir de « faire » et « défaire » en un clin d’œil l’artiste. Hirst en a conscience quand il dit que c’est grave si les œuvres sont mauvaises et que l’argent coule à flots. Et puis : « L’art ne sert qu’à une chose, lâche-t-il. Répondre à la question : “qu’est-ce qu’on fait iciˮ XX ?», et encore, ceci étant lié à cela : « La mort est vraiment l’une des choses que vous ne pouvez pas éviter. Plutôt que de ne pas en parler, il faut lui faire face XX. »

 

L’ENFANT ET L’ENCHANTEUR

Le titre donné au requin dans le formol : The Physical Impossibility of Death in the Mind of Someone Living (1991) XX est déjà le début d’une fiction. Treasures from the Wreck of the « Unbelievable » en est un autre. D’un titre à l’autre, peut-on trouver confessions plus intimes ? Peut-on formuler un intime mieux partagé, avec cette peur de la mort présentifiée par Méduse en Grèce ancienne, et pour Hirst « la mort impossible à penser pour l’esprit de quelqu’un de vivant » ? Cette part intime, sous l’aspect de ces trésors enfouis à même les cellules du système nerveux central qui se forment dès l’état d’embryon, et ne se répliquent pas au cours de la vie, seraient-elles ces Trésors issus du naufrage de notre enfance ? « L’incroyable » étant cette part de nous-mêmes inchangée depuis avant notre naissance ? Trésors bien enfouis en chacun de nous ? Trésors avec lequel les artistes ne cessent d’être en contact et qu’ils ou elles ont la charge de mettre au jour ? D’exhumer, comme le dit Walter Benjamin, comme une fouille archéologique XX, essentiellement sous forme de fragments ? Car si ces trésors ont « fait naufrage », leur préservation dans le corps de l’artiste adulte pourrait alors être l’équivalent du séjour de deux mille ans au fond d’un Océan au large de l’Afrique.

Nous savons depuis quelque 45 ans que de ce continent provient notre ancêtre la plus lointaine, Lucy XX, et qu’à partir de là l’être humain a migré petit à petit sur la totalité de la planète. Pour remonter du fond de l’inconscient cette plus ancienne histoire maintenant connue dont la moindre de nos cellules garde la mémoire, mais dont nous n’avons nul souvenir, rien d’autre que la puissance de la fiction, sa part « incroyable » d’invention, où l’on sent bien que faire ou feindre, c’est du pareil au même. Car les mêmes cellules gardent aussi vive en mémoire, tout aussi enfouie, le mythe de Méduse et sa face de terreur. Platon écrit que les terreurs de ce type relèvent, dans l’homme, de l’enfant :

Il y a au-dedans de nous je ne sais quel enfant à qui ces sortes de choses font peur […] Pour chasser de telles frayeurs, observe alors le Socrate du dialogue, il faut un enchanteur accompli et une incantation quotidienne jusqu’à ce que l’enfant soit apaisé par les enchantements XX. » L’enfant et l’enchanteur, tel devrait être l’artiste, un inventeur de fictions.

À ceci près que l’artiste, jamais tenu de respecter la mythologie, invente son propre monde, où Méduse n’est pas un monstre. Humaine, nullement victime d’une fatalité, elle est son double féminin, aucun artiste n’étant assigné à un seul genre. Si Méduse a une fonction apotropaïque, c’est l’artiste qui assure cette fonction par l’hubris de cette exposition dont la multiplicité (y compris les quatre Severed Heads of Medusa ) lui sert à affronter la mort en la tenant à distance.


[ Voir photo 2, onglet Images en haut de page.] É. Chiron, Trois fillettes à la plage avec Méduse, 2019, peinture numérique, impression à jet d’encre sur papier, 2019, 150 x 112, 50 cm.



 

© Éliane Chiron, revue Les Cahiers internationaux du Symbolisme, n° 152-153-154, novembre 2019

 

 

Notes

  1. Voir en ligne plusieurs vidéos montrant la totalité de l’exposition, sous le titre : « Expo- Damien Hirst à Venise ». Consulté le 10-06-2019.
  2. O. Bloch et W. von Wartburg, Dictionnaire étymologique de la lague française. Paris, PUF, 1960.
  3. Carol Vogel, « Les retouches de l’artiste Damien Hirst. Les Dents de la mer version formol », dans courrierinternational.com. Publié le 24 janvier 2007. Consulté en ligne le 11 juin 2019.
  4. Françoise Frontisi-Ducroux, Du masque au visage. Aspects de l’identité en Grèce ancienne, Paris, Flammarion, « Champs Arts », 2012, p. 26-27.
  5. Id., p. 27.
  6. Id., p. 128.
  7. Et pourtant j’avais déjà utilisé, en la faisant virer au rouge avec Photoshop, un détail de cette Méduse, dans un montage avec trois fillettes jouant sur une plage (voir ci-dessus, onglet Images, photo 2). Méduse bouchant l’horizon y est une menace.
  8. Jean-Pierre Vernant, La mort dans les yeux : Figures de l’Autre en Grèce ancienne, Paris, Hachette, « Pluriel », 1989, p. 104.
  9. Platon, Alcibiade (132 e -133a), cité par Vernant, ibid.
  10. Françoise Frontisi-Ducroux, op. cit., p. 22.
  11. Id., p. 199.
  12. Id., p. 247.
  13. Id., p. 248.
  14. Id., p. 260.
  15. Id., p. 258.
  16. Ibid.
  17. Id., p. 260.
  18. Id., p. 263.
  19. Id. p. 265.
  20. Id. p. 266.
  21. Id., p. 267.
  22. Id., p. 148.
  23. Monica d’Andrea, sur Le Temps., publié le 10 novembre 2017, consulté le 15 mai 2019 : https://www.letemps.ch/culture/sillage-lincroyable
  24. « Damien Hirst le requin de l’art ». Sur le site Paris Match, un entretien avec Aurélie Raya publié le 19 avril 2010, consulté le 7 juillet 2019.
  25. Les Lettres à un jeune poète de Rilke disent tout à ce sujet, quel que soit l’art pratiqué.
  26. Cité par Frontisi-Ducroux, op. cit., p. 128.
  27. « Gorgo est chez elle au pays des morts dont elle interdit l’entrée à tout homme vivant. » dans J.P. Vernant, op. cit, p. 47.
  28. Cécile Guilbert, « Damien Hirst ou les infortunes de la crédulité », publié sur le site de La Croix le 27 septembre 2017. Consulté le 27 juin 2019.
  29. J.K. Huysmans, À Rebours (1884), Paris, Fasquelle, 1957, p. 118.
  30. Id., p. 124.
  31. Ibid.
  32. Id., p. 126.
  33. Sabine Gignoux, « À Venise, le show monstre de Damien Hirst » le 18/05/2017 à 14h33. Mis à jour le 18/05/2017 à 15h35, La Croix, Consulté le 27-09-19.
  34. Bernard Genies, « Le trésor retrouvé de Damien Hirst à Venise ». Publié le 8 avril 2017 sur le site nouvelobs.com, consulté le 15 juin 2019.
  35. Voir Éliane Chiron, L’énigme du visible, préface de Jacques Leenhardt, coll. Arts plastiques, Publications de la Sorbonne, 2013.
  36. Jean-Pierre Vernant, L’individu, la mort, l’amour. Soi-même et l’autre en Grèce ancienne, Paris, Gallimard, « Bibliothèque des histoires »,1989, p. 132. Gorgo s’oppose à Thanatos, au masculin : la belle mort au combat.
  37. Jean-Pierre Vernant, La mort dans les yeux, op. cit., p. 40.
  38. Jean-Sébastien Stehli, « Damien Hirst, l’artiste à la tronçonneuse » publié le 12 avril 2001 sur le site de L’Express : https://www.lexpress.fr/.../damien-hirst-l-artiste-a-la-tronconneuse_642011.html. Consulté le 30 juin 2019.
  39. Interview réalisée par Ricardo Figueira « Damien Hirst. L’art ne doit pas avoir peur de l’argent », publié le 23 décembre 2010 sur https://fr.euronews.com. Consulté le 30 juin 2019.
  40. Le requin se retrouve dans l’exposition, dans le groupe monumental Andromeda and the Sea Monster, 2011, bronze, 391 x 593 x 369,7 cm.
  41. Walter Benjamin, « Fouilles et souvenir » (Denkbilder, Suhrkamp Verlag, Frankfurt am Main, 1974,1981), dans Images de pensée, trad. J.F. Poirier et J. Lacoste, Paris, Christian Bourgois, « Détroits », 1998, pp. 181-182.
  42. Avec Lucy (qui date de 3,2 millions d’années et découverte en Éthiopie) mais aussi d’autres fossiles au moins aussi anciens, découverts au Tchad et en Afrique du Sud, nous savons depuis 1975 que ces fossiles d’australopithèques sont ceux de nos plus lointains ancêtres. Depuis peu, nous savons donc répondre à la question : « d’où venons-nous ? »
  43. Jean-Pierre Vernant, La mort dans les yeux, op. cit., p. 61.

Images

Damien Hirst, The Severed Head of Medusa, 2008, Malachite, 18 x 49,6 x 52 cm. / Photo É. Chiron, Palazzo Grassi, octobre 2017.
© É. Chiron, Trois fillettes à la plage avec Méduse, 2019, peinture numérique, Impression à jet d’encre sur papier, 2019, 150 x 112, 50 cm.

Metadata

Auteurs
Éliane Chiron
Sujet
Damien Hirst. Treasures Wreck Unbelievable. Palazzo Grassi. Punta della Dogana, Venise. 2017. Méduse. Gorgone. Trésors Épave Incroyable
Genre
Essai esthétique
Langue
Français
Relation
Revue Les Cahiers internationaux du Symbolisme, n° 152-153-154, novembre 2019.
Droits
© Éliane Chiron, revue Les Cahiers internationaux du Symbolisme, n° 152-153-154, novembre 2019.