© 2015, Josse Goffin, Regard à gauche

Les Voix de l’ombre, film collectif

Jules de Foestraets

Texte

Le collectif «Extérieur jour» offre l’opportunité aux Bruxellois de réaliser, en groupe d’environ 10 personnes, un film d’une durée de 26 minutes sur un sujet au choix. Cette activité est ouverte à tous ceux âgés entre 18 et 90 ans et c’est toutes les quatre semaines qu’une équipe se met à travailler à la réalisation d’un nouveau film.



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Cest dans l’univers du doublage que le film Les Voix de l'ombre nous emmène. En 26 minutes, ce fabuleux documentaire, bourré d’inventivités, parvient à nous faire découvrir tout ce qui tourne autour de la discipline du doublage, de sa naissance, jusqu’à son évolution de nos jours.

D'emblée, Les Voix de l’ombre séduit par sa narration fluide, captivante, fascinante, complète et détailléé sur le doublage — ce qui est une prouesse quand on connaît la richesse de ce métier. Le film est explicatif, sans jamais perdre le spectateur. Il est également ponctué de séquences de transitions animées en stop-motion, qui sont d’une qualité impressionnante et qu’on n’a pas l’habitude de voir dans ce style de film, dues au talent des personnes derrière ce film.

Nous avons pu interroger l’un de ses créateurs, Sunny Latchoomun, qui a confirmé qu’ils ont tout fait à la main, sauf les fonds qui ont été réalisés digitalement. Ils ont bénéficié aussi de l’aide d’un monteur professionnel qui a peaufiné leur animation.

Tout le long du documentaire, nous rencontrons des personnes spécialisées dans le domaine du doublage. La première, Geneviève Maubille, une enseignante à «Louvain School of Translation and Interpreting» va revenir sur les origines de cette pratique. À l’époque du cinéma muet, les dialogues étaient représentés par des intertitres, c’est à l’arrivée du cinéma parlant, à l’extrême fin des années 1920, que le doublage est né.
Elle va nous expliquer comment s’est déroulée cette transition entre le muet et le sonore et de quelle manière la pratique du doublage s’est démocratisée.

On va ensuite nous présenter des comédiens de doublage, Olivier Cuvellier et David Scarpuzza, qui relatent les facettes de leur métier et ce qui les a amenés à l’exercer. Ils vont également expliquer comment la profession a évolué en Belgique, en se penchant sur des événements du passé.
Par exemple, la grève des doubleurs en France dans les années 1990, revendiquant une réestimation de leurs salaires, a amené de nombreux studios à s'installer en Belgique pour trouver de nouveaux doubleurs.



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Nous allons ensuite faire la rencontre de Emmanuel Maindiaux, le directeur du studio Digital Factory.
Il donne des détails sur la manière dont est géré un studio de doublage: les contacts clients qui désirent trouver une voix,  le choix des comédien.ne.s, les équipements et le déroulement de l’enregistrement.

Le documentaire va également s’intéresser à des concepts comme l’isochronie dans le doublage. Pour une isochronie réussie, il faut que le son enregistré soit raccord avec les mouvements des lèvres des acteurs. Si cela n’est pas effectué correctement, cela se remarque immédiatement.

On s’interroge aussi sur les choix d’adaptation qui sont faits lors de la traduction des dialogues. Pour que le doublage d’un film étranger fonctionne dans notre culture, il faut parfois changer les mots de la version originale, ils ne doivent pas être respectés à la lettre: c’est leur effet qui doit être conservé, le spectateur doit saisir le message que veut transmettre l’œuvre.



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Enfin, le documentaire va se pencher sur les droits des doubleurs belges et sur le risque des intelligences artificielles dans ce métier.

La parole sera donnée à David Macaluso, un comédien de doublage belge à l’origine de la convention sur le doublage.
Il raconte la naissance de cette convention et son impact sur l’évolution des droits des doubleurs en Belgique.
La problématique des intelligences artificielles est abordée: la technologie se perfectionne rapidement, comment garantir que les comédiens pourront continuer à exercer sans être surpassés? Il est évident que cela pose un enjeu éthique considérable.



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Selon Sunny Latchoomun, le groupe de réalisation a tourné plus de six heures d'images. Ils ont dû sacrifier des parties significatives pour arriver aux 26 minutes de cet exercice de contenu et de mise en scène. Des artistes à suivre de près!




© Jules de Foestraets, revue en ligne Cinergie, 26.08.2024

Tous les films "Exterieur jour", collectif bruxellois, sont diffusés sur la chaîne de télé Bx1
ensuite, ils sont visionnables sur YouTube:
https://www.youtube.com/watch?v=mJEF3CCE-1c&t=2s




Metadata

Auteurs
Jules de Foestraets
Sujet
Film Les Voix de l'ombre. Doublage de films et de programmes. Collectif "Extérieur Jour". Bruxelles 2024
Genre
Chronique cinéma
Langue
Français
Relation
revue en ligne Cinergie, 26.08.2024
Droits
© Jules de Foestraets, revue en ligne Cinergie, 26.08.2024