© 2015, Josse Goffin, Regard à gauche

Patrimoine : Norge le proférateur

Daniel Laroche

Texte

Dans les années 1970-1980, une opinion est fort répandue en Belgique francophone : nos trois plus grands poètes vivants sont Marcel Thiry, Henri Michaux et Norge, ces deux derniers s'étant hélas expatriés en France depuis de nombreuses années.

Toutefois, si H. Michaux a en effet rompu quasi totalement avec son pays d'origine XX , il n'en va pas de même pour Norge, qui s'est installé à Saint-Paul-de-Vence XX en 1955 mais reste en contact étroit avec son fils Jean Mogin, la famille de celui-ci ainsi que de nombreux amis comme Hermann Closson, Edmond Vandercammen, Yechouroun et Golda Diesenhaus, Jean Tordeur, Charles Bertin, Roger Bodart ou Théodore Koenig.

En 1959, âgé de 61 ans, il reçoit d'ailleurs le « Prix triennal de poésie » pour son recueil Les oignons. Plusieurs autres livres contribuent à sa notoriété, dont deux chez Gallimard : La langue verte (1954), Les quatre vérités (1962).
En janvier 1963, le revoici à Bruxelles pour recevoir une bourse du Ministère de la Culture, non sans prendre l'un ou l'autre bain de foule : Marcel Thiry XX le présente avec finesse au public du Musée Charlier, après quoi il donne une conférence aux Midis de la Poésie, devant un auditoire conquis par sa verve. Les années suivantes, il fait son entrée aux éditions Flammarion, où Marc Alyn dirige la collection « Poésie » ; y paraitront pas moins de cinq volumineux recueils, dont Le vin profond (1968), Les cerveaux brûlés (1969), Les oignons et caetera (1971), aussitôt en vitrine dans les librairies wallonnes et bruxelloises.

En mars 1971, Norge – qui vient d'obtenir la nationalité française – effectue en Belgique une nouvelle tournée qu'on peut qualifier de triomphale : Prix quinquennal de littérature du Gouvernement belge, Prix Belgique-Canada, exposition à la librairie La Jeune Parque, entretiens à la radio, banquet à l'hôtel Métropole.

Le cercle de ses lecteurs s'élargit sans cesse, les visiteurs affluent à Saint-Paul-de-Vence, des récitals ont ses poèmes à l'affiche, des travaux universitaires lui sont consacrés. Et voici qu'en 1978 sort de presse chez Seghers un épais volume de 690 pages à la couverture blanche et sobre : Norge. Œuvres poétiques 1923-1973.
Pour de nombreux amateurs, ce « pavé »XX est une véritable révélation. Ils découvrent notamment que, bien avant la guerre, Géo Norge – tel était alors son pseudonyme – a publié plusieurs recueils de grande qualité ; et que ceux-ci, devenus introuvables, tranchent fort par leur style et leur contenu avec les livres qu'ils connaissent, tous datés d'après 1945.

Ainsi l'image du poète dans le public commence-t-elle à se complexifier, tandis que, grâce à quelques essais et numéros spéciaux de revue, l'on redécouvre le rôle qu'il a joué dans l'activité littéraire des années 1920-40 en Belgique.

                                                                                 *


Né à Bruxelles en 1898, grand lecteur de poésie, Georges Mogin est voyageur de commerce en textiles lorsqu'il publie à compte d'auteur 27 poèmes incertains (1923). Aussitôt, il dédicace des exemplaires à quelques amis, poètes, critiques littéraires ou directeurs de périodiques comme Franz Hellens, lequel vient de créer avec Robert Mélot du Dy Le disque vert.
C'est aux éditions du même nom que parait en 1926 sa deuxième plaquette, Plusieurs malentendus, avec en frontispice un bois de son ami Frans Masereel. D'esprit désabusé, ces premiers poèmes dénoncent l'étouffante comédie sociale, le culte du paraitre, le mal-être d'un « je » qui rêve d'évasion et d'exaltation; dans la ligne de prédécesseurs tels qu'Apollinaire ou Cendrars, le style se caractérise par des vers courts et irréguliers, l'absence de rime, de nombreux rejets et enjambements, l'invention de néologismes:

   Ce colloque avec un fou
   sur une barque,
   en pleine mer,
   c'est
   la vieille peur de moi-même
   en tête-à-tête avec moi-même.

   Demain est la plus fabuleuse aventure.

   Hélas ! Combien de Simplons
   à percer au cœur
   des monts
   pour germer dans Chanaan ! XX


Ayant lu avec intérêt Plusieurs malentendus, les « pré-surréalistes » Paul Nougé, Édouard Mesens et Camille Goemans invitent Norge à les rejoindre. Or, estimant absurdes ou négatifs plusieurs aspects de leur programme, le poète débutant non seulement décline la proposition, mais entreprend de discréditer le mouvement naissant dans une parodie théâtrale : Tam-tam.

Il s'est en effet associé avec le comédien Raymond Rouleau pour créer le Groupe Libre, dont les spectacles seront montés à la salle du Casino XX . Ainsi, en octobre-novembre 1926, les représentations de Tam-tam sont-elles copieusement chahutées par P. Nougé et ses comparses, ce qui vaut au Groupe Libre et à Norge une publicité inattendue, tout en marquant le véritable démarrage du groupe surréaliste bruxellois XX .

Cette expérience sans lendemain infléchit-elle l'évolution du jeune poète-dramaturge, ou celui-ci estime-t-il que le modernisme égotiste et amer de ses débuts est définitivement périmé ? Quoi qu'il en soit, il publie en 1929 deux plaquettes qui marquent un radical changement d'inspiration et d'écriture : Avenue du ciel et, hommage discret à Odilon-Jean Périer XX , Souvenir de l'enchanté.

La vision est désormais plus sereine et plus irréelle, entièrement détachée des réalités et des frustrations quotidiennes, ouverte aux thèmes de l'amitié et du dépassement à l'égard du monde matériel.

Parallèlement, G. Mogin porte un grand intérêt à l'activité littéraire et artistique en Belgique mais aussi en France, grâce notamment à La nouvelle revue française où officie Jean Paulhan. Animateur dans l'âme, il accueille en sa villa d'Uccle des écrivains, dramaturges, peintres, critiques, pour des conversations passionnées où le rire tient une grande part. Tel est le cadre dans lequel, début 1931, il lance avec Pierre Bourgeois et d'autres Le Journal des Poètes, à la rédaction duquel est bientôt associé Pierre-Louis Flouquet. De son côté, l'éditeur Alexandre Stols lui commande une anthologie de la nouvelle poésie belge, que préfacera F. Hellens XX ; parue en 1934, celle-ci constitue un témoignage très avisé de la production poétique de l'époque.

Entretemps, Norge a quitté le domicile conjugal pour s'installer rue du Musée XX avec son amie Denise Perrier, peintre d'origine française. Ils aménagent aussitôt leur vaste grenier en vue d'y organiser des soirées mensuelles de poésie. C'est là que se rencontrent dans une ambiance chaleureuse plusieurs dizaines d'auteurs, parmi lesquels Albert Mockel, Georges Marlow, Dominique Rolin, Marcel Lecomte, Paul Neuhuys, Robert Vivier, Éric de Haulleville, Robert Guiette ; déclamation de poèmes, conférences littéraires, numéros d'imitation se concluent sur une collation qui mêle le boire, le manger et le bavardage. Jamais à court d'initiatives, le maitre de maison crée en 1936 avec trois amis XX une nouvelle revue : Les cahiers blancs, hélas interrompus après quatre numéros par la déclaration de guerre en 1939.


Après le tournant de 1929, la production de Norge reste caractérisée par la propension au féerique et au surnaturel, dans un style sobre et délicat, tandis qu'un phénomène marquant y fait son apparition : la réécriture de textes ou de genres littéraires anciens, qu'il réinterprète très librement, tout en élaguant leur composante anecdotique, pour en exhiber des potentialités imaginaires et sémantiques imprévues.

Calendrier (1932) réactive en douze « mois » l'ancien Almanach des Muses ; se souvenant de Charles Perrault, La belle endormie (1935) revisite sur un mode méditatif La belle au bois dormant ; sans doute C'est un pays (1936) est-il lointainement inspiré par Le grand Meaulnes d'Alain-Fournier ; Le sourire d'Icare (1936) se réfère évidemment à la mythologie grecque ; enfin, dans un esprit plus malicieux et plus paradoxal, L'imposteur (1937) rassemble des historiettes moralisantes pas très éloignées des Caractères et Anecdotes de Chamfort.

Anticipons vite : cette méthode d'écriture, non sans un élargissement progressif de son référentiel, va nourrir de manière durable la poésie norgienne... Cependant, ces mêmes années, G. Mogin connait une vive crise religieuse, recrudescence impromptue de son éducation chrétienne. Il lit des auteurs mystiques, des poètes comme O.V. Milosz, demande conseil à Jean de Boschère qu'il admire et considère comme un maitre. Le sourire d'Icare ne suggérait-il pas déjà une équivalence entre « défier Dieu » et « l'adorer » ? Mais surtout, il prépare un livre qu'il conçoit comme le point d'orgue de sa quête : Joie aux âmes, dont il achève le manuscrit à Redu en 1938 et qui paraitra en 1941 (La Maison du Poète).

   Éloignez-vous, je veille et pense à vos noces prochaines. Vos yeux verront encore des vignobles dorés émergeant du matin et des villes blanchies à la chaux,

   Et vos sommeils seront peuplés de grands portiques suspendus où rayonne la promesse de Dieu.

   Mais mon espoir n'est point parmi vos races. Je veux dans ces forêts cacher mon dénuement qui vous serait un sujet de faiblesse.

   Et je demeure aux écoutes. XX

Contrairement à ce qu'ont affirmé des critiques comme J. Tordeur XX , Joie aux âmes n'est nullement la « clé » de la poésie norgienne : c'en est seulement un épisode, émouvant certes mais sans grande originalité littéraire, visiblement influencé par la forme et la thématique du « verset biblique », tel que l'avaient pratiqué avant lui Paul Claudel ou Saint-John Perse.

Comme arrivé dans une impasse, son auteur va d'ailleurs connaitre une « traversée du désert » longue d'une dizaine d'années ; durant la guerre 1940-45 et après, il se contente de participer aux éditions du Cercle d'Art dirigées par son ami Albert Sauvenier, tout en accumulant des manuscrits sans grand intérêt qui resteront inédits...

C'est de l'extérieur que va venir le déblocage : auréolé de son action dans la Résistance, le poète-éditeur Pierre Seghers lui écrit en effet après la Libération et lui demande des textes pour sa collection P.S.
La crise spirituelle ayant laissé place à un scepticisme teinté d'amertume, Norge, qui a cinquante ans, a renoncé à l'interrogation religieuse et à la grandiloquence du verset. Il se tourne vers d'autres modèles, particulièrement les chansons des rues et les complaintes populaires, où se mélangent tendresse, cynisme et humour noir ; ainsi développe-t-il une poétique en rupture complète avec ses recueils d'avant-guerre.

Dans les années 1949-1953, la triade formée par Les râpes (P. Seghers, coll. « Poésie 49 », 1949), Famines (A.A.M. Stols, 1950) et Le gros gibier (P. Seghers, 1953) inaugure soudainement ce style nouveau – qui conquiert bientôt le public. Le vers est désormais plus court, le phrasé plus sec et plus rythmé, la langue plus savoureuse, tandis que la vision du monde est dominée par un prosaïsme souvent populiste, sans oublier le thème darwinien de la « lutte pour la vie ».

   Le gai carnivore
   Au dieu qu'il adore
   Gloussant,
   Réclame en naissant
   La chair et le sang,
   Le sang. XX

Cependant, la même période voit naitre un quatrième recueil, d'une facture encore différente : Les oignons (Epf, 1953, rééd. Augmentée de 50 inédits, Henneuse, 1956). Il s'agit cette fois de courtes fables acidulées, plus malicieuses que sentencieuses, où l'auteur laisse libre cours à sa verve narrative et à son amour du paradoxe:

    Justement la plus belle brebis devint galeuse. Comme c'était la plus belle, on aima bien cette gale et d'autres brebis voulurent devenir galeuses.
    Une seule brebis demeura sans gale.
    Eh bien, on lui tint rigueur, on la mit à l'écart. Et on la nomma la brebis galeuse. XX


La renommée de Norge s'étend rapidement, en France autant qu'en Belgique. R. Bodart lui consacre une émission radio de l'I.N.R. Peu avant sa mort en 1951, André Gide aime demander à ses visiteurs « Avez-vous lu Norge ? » et leur déclamer le poème « Monsieur » XX en le qualifiant de « très épatant. » Jean Marcenac et Louis Aragon parlent de lui dans Les Lettres françaises XX , Jean Rousselot dans Les nouvelles littéraires. Les Cahiers du Nord lui consacrent un numéro spécial XX . Le jeune poète Robert Rovini publie en 1956 un Norge dans la déjà célèbre collection de P. Seghers « Poètes d'aujourd'hui ».

G. Mogin, à vrai dire, se tourne de plus en plus vers la France, qu'il ressent comme sa véritable patrie. Après la Libération, il a délaissé le rôle d'animateur qu'il jouait précédemment dans le milieu littéraire, suspendu sa collaboration au Cercle d'Art, resserré les liens épistolaires avec Jean Paulhan, tandis que sa femme expose ses toiles à Paris et que son fils Jean triomphe au théâtre du Vieux-Colombier avec sa pièce À chacun selon sa faim.
Le métier de représentant de commerce lui pèse chaque jour davantage. Il rêve de devenir antiquaire, en mettant à profit les compétences et les trésors accumulés de longues années durant à force de chiner sur le Marché aux Puces et ailleurs. L'héliotropisme fait le reste : il quitte la Belgique fin 1954 pour s'installer en Provence.

                                                                                     *


Si, comme on l'a vu, la poétique norgienne a fort évolué au fil des ans, la période creuse 1939-1949 ne constitue pas une rupture radicale. Les recueils des années 1930 contiennent en germe au moins quatre options durables : le refus de tout hermétisme, le réemploi de formes ou de textes préexistants, le genre de l'historiette déroutante amorcé dans L'imposteur, le questionnement irrésolu quant à l'existence de Dieu.

À ces traits vont s'ajouter bien d'autres, comme l'alternance entre le rire et le sérieux, le jeu sur la matérialité de la langue, la détrônisation carnavalesque, les variations contrastées de registre et de ton. Bref, Norge à partir de 1950 n'est aucunement un « néo-classique », comme on a pu l'écrire.
Certes, sa poésie n'offre pas la moindre trace d'avant-gardisme : sa modernité – quoique réelle – reste très discrète, sa lisibilité irréprochable, sa versification généralement régulière.
Par contre, elle présente une hétérogénéité et un anticonformisme qui en font une œuvre difficilement classable.

Si l'on considère les livres de la maturité, on constate que le style noble et ample de Joie aux âmes a quasi complètement disparu, hormis une exception curieuse, Le vin profond (Flammarion, coll. « Poésie », 1968).
Mais l'auteur a reconnu que plusieurs de ces pages dormaient depuis longtemps dans ses tiroirs ; et la dernière partie du livre, tout en conservant la forme du verset, détourne celle-ci de son usage classique au profit d'histoires aigres-douces, de « Job »  au « Plumeau » en passant par « Le lombric ».

Ce n'est pas que la poésie de Norge, entre 1950 et 1990, soit exempte de thèmes graves ou sérieux, mais ils s'y expriment sans emphase, dans un style concis, voire même cinglant. Ainsi Les quatre vérités (Gallimard, 1962), La belle saison (Flammarion, coll. « Poésie », 1973), Les coq-à-l'âne (Gallimard, 1985), Le stupéfait (Gallimard, 1988) XX livrent-ils de l'existence humaine en général, ou de l'expérience vécue par le « je », une vision empreinte tour à tour de noirceur, d'âpreté ou de mélancolie.

   Et serrez plus fort les barreaux,
   Il passe encore de l'espérance.
   Et du ciel, ils en ont bien trop :
   Un rais suffit à leur pitance. XX


Davantage que les autres recueils, ces quatre livres montrent un poète sans cesse préoccupé par le sens de la vie humaine et par sa place personnelle dans le monde. Dieu restant décidément introuvable, et l'au-delà paraissant une chimère, la frustration l'emporte souvent sur l'espoir. Ainsi faut-il comprendre le cynisme et l'humour noir qui nourrissent de nombreux poèmes : la rancœur, tout classiquement, s'est retournée en agressivité, et celle-ci s'exerce sur des personnages fictifs créés pour la circonstance.

   On comprend qu'on s'est égaré
   Et que les dieux nous ont menti.
   Puisque l'espérance est un crime,
   Laissons-les tous seuls dans la cime.
   Sus à la vieille soupe aux clous
   Que les démons cuisent pour nous. XX


Ceci dit, le rire et le sourire occupent eux aussi une place importante dans la poésie norgienne, où ils contrebalancent la veine de l'amertume au gré de nombreuses variantes.
Jouant sur diverses formes d'excès, la « farce moralisante » est l'une de celles-ci. « Le bal masqué » XX imagine une résurrection des morts aussi farfelue qu'anarchique, au terme de laquelle tous les masques tombent.
« Soir des grand'merdes » XX n'est pas en reste, où le ciel est envahi par des escadrilles d'étrons ; après un temps de panique et de choléra, l'homme finit cependant par les apprivoiser. S'achevant sur une note penseuse, ces histoires fantasques s'apparentent aux fables plaisantes des Oignons.

De celles-ci, Les cerveaux brûlés (Flammarion, coll. « Poésie », 1969), Dynasties (Gérard Oberlé, 1972), Les oignons sont en fleur (Dessins de Serge Creuz, Jacques Antoine, 1979), Le sac à malices (Le Pavé, 1984) offrent de nouveaux et savoureux exemples, qui constituent sans doute la part la plus populaire de la production norgienne.
Il ne s'agit pas de comique à proprement parler, mais plutôt d'une sorte d'humour en demi-teinte qui fait grand usage du paradoxe et prend systématiquement le contrepied d'opinions courantes. Fréquemment, ces petits textes partent d'une expression consacrée qu'ils détournent de son sens initial : « deux pelés et trois tondus », « donner des perles aux cochons », « être mal dans sa peau », etc.
La malice norgienne s'exprime aussi dans des recueils-bestiaires comme Les rhinobsédées (Michel Richard, 1976), Le pense-bêtes (Gérard Oberlé, 1977), Le canard de ma tante (Saint-Germain-des-Prés, coll. « L'enfant la Poésie », 1982), « Poils et plumes » XX , où les portraits d'animaux induisent des situations ou des réflexions saugrenues.


Si, à partir des années 1970, la poésie de Norge touche des publics de plus en plus variés, ce n'est pas seulement par le biais des recueils proprement dits. En raison de son caractère foncièrement oral, elle fait l'objet de diverses déclamations en public, dont celles de Suzanne Philippe, Robert Delieu, Charles Kleinberg ; dans les conservatoires et les académies, nombreux sont les professeurs qui l'inscrivent au programme de leurs cours.

Plusieurs textes sont mis en chanson par Michel Ardan, Janine Disenhaus, Jeanne Moreau – avec un double album –, Georges Brassens ou, récemment, le groupe Modern Cubism.

Dans une veine plus confidentielle, des mémoires universitaires lui sont consacrés à Münster, Liège, Louvain, Louvain-la-Neuve, Valenciennes.

Par contre, elle est peu traduite : à l'évidence, son travail constant et très élaboré sur les sonorités, le rythme, le vocabulaire, les expressions courantes se transpose difficilement dans une autre langue...

Bref, à l'aune des hommages publics, les années 1980 sont celles du plus grand rayonnement norgien : émission télévisée sur France 3 avec Jeanne Moreau, festival Norge à la Maison de la Poésie de Paris, numéro spécial de la revue ORACL, Grand Prix de poésie de la Société des Gens de Lettres, Quinzaine Norge à la Maison de la Culture de Caen, Prix de la critique pour Les coq-à-l'âne, parution de Remuer ciel et terre chez Labor, exposition au Palais des Beaux-Arts de Bruxelles, etc.

Entretemps, il a fallu fermer le magasin d'antiquités de Saint-Paul. Georges et Denise se sont retirés dans une jolie villa sur la hauteur de Mougins, où ils continuent d'écrire, de lire, de recevoir des visiteurs.
En l'honneur de son nouvel occupant, le maire a rebaptisé la rue « Allée du Poète ».
C'est là que, veillé par sa femme et sa belle-fille Lucienne Desnoues, Norge rend le dernier souffle le 25 octobre 1990.


© Daniel Laroche, 2017

 

Notes

1. Cf. notamment Jean-Pierre Martin, Henri Michaux, Gallimard, 2003, p. 506 et sv.
2. Avec sa femme Denise Perrier, il a ouvert un magasin d'antiquités sur la route de Cagnes à Vence.
3. Alors Secrétaire perpétuel de l'Académie royale de Langue et de Littérature françaises de Belgique.
4. L'expression est de Jean Mogin.
5. « Colloque », dans 27 poèmes incertains, version revue de 1978.

6. Aujourd'hui Le Mirano, chaussée de Louvain à Saint-Josse-ten-Noode.
7. Cf. Marcel MarÏen, L'aventure surréaliste, Lebeer-Hossmann, 1979, p. 129.
8. O. J. Périer est mort en 1928 à l'âge de 26 ans.
9. Florilège de la nouvelle poésie française en Belgique.
10. Mont-des-Arts, près de la Bibliothèque Royale.

11. René Henriquez, Franz Briel et André Allard l'Olivier.
12. Poème de la mission. Le Poète, II, p. 55.
13. Cf. entre autres Norge de tout jour, La Renaissance du Livre, 2001, p. 20 et 22.
14. « Carnivore », dans Les râpes, p. 9.
15. « La brebis galeuse », dans Les oignons, p. 16.

16. Dans Famines, p. 9.
17. Une formule de L. Aragon : « Géo Norge, peut-être l'un des plus grands des poètes vivants. »
18. Cahiers du Nord (Charleroi), n° 4, 1952-53.
19. Recueil publié par Norge après la mort de son fils Jean en avril 1986.
20. « Musique », dans Les quatre vérités, p. 67.

21. « Blasphème », dans Le stupéfait, p. 114.
22. Dans Bal masqué parmi les comètes, Les Éditeurs Français Réunis, 1972, p. 33-75.
23. Dans Eux les anges, Flammarion, coll. « Poésie », p. 67-82.
24. Dans Jacques Ferlay, Norge, Le Temps parallèle, coll. « Rencontres », 1990.



Notes

  1. Cf. notamment Jean-Pierre Martin, Henri Michaux, Gallimard, 2003, p. 506 et sv
  2. Avec sa femme Denise Perrier, il a ouvert un magasin d'antiquités sur la route de Cagnes à Vence
  3. Alors Secrétaire perpétuel de l'Académie royale de Langue et de Littérature françaises de Belgique
  4. L'expression est de Jean Mogin
  5. « Colloque », dans 27 poèmes incertains, version revue de 1978
  6. Aujourd'hui Le Mirano, chaussée de Louvain à Saint-Josse-ten-Noode
  7. Cf. Marcel MarÏen, L'aventure surréaliste, Lebeer-Hossmann, 1979, p. 129
  8. O. J. Périer est mort en 1928 à l'âge de 26 ans
  9. Florilège de la nouvelle poésie française en Belgique
  10. Mont-des-Arts, près de la Bibliothèque Royale
  11. ené Henriquez, Franz Briel et André Allard, l'Olivier
  12. Poème de la mission. Le Poète, II, p. 55
  13. Cf. entre autres Norge de tout jour, La Renaissance du Livre, 2001, p. 20 et 22
  14. « Carnivore », dans Les râpes, p. 9
  15. « La brebis galeuse », dans Les oignons, p. 16
  16. Dans Famines, p. 9
  17. Une formule de L. Aragon : « Géo Norge, peut-être l'un des plus grands des poètes vivants. »
  18. Cahiers du Nord (Charleroi), n° 4, 1952-53
  19. Recueil publié par Norge après la mort de son fils Jean en avril 1986
  20. « Musique », dans Les quatre vérités, p. 67
  21. « Blasphème », dans Le stupéfait, p. 114
  22. Dans Bal masqué parmi les comètes, Les Éditeurs Français Réunis, 1972, p. 33-75
  23. Dans Eux les anges, Flammarion, coll. « Poésie », p. 67-82
  24. Dans Jacques Ferlay, Norge, Le Temps parallèle, coll. « Rencontres », 1990

Metadata

Auteurs
Daniel Laroche
Sujet
Bio bibliographie de Norge (alias Georges Mogin), poète et écrivain belge francophone
Genre
Essai littéraire
Langue
Français
Relation
Revue Le carnet et les instants n° 195 - 1er trimestre 2017
Droits
© Daniel Laroche, 2017