Il-a zûnè sèt´ cint côps ! N° 100 ! [décembre 1957]
Comité de rédaction
Texte
Cette livraison de èl bourdon est en effet la 700e, ce qui, pour un hyménoptère, est un chiffre considérable, diront les entomologistes et Mésse Coq. Nous n’allons pas refaire ici l’historique de la revue, nous nous contenterons de rappeler les grandes étapes de son existence.
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Elle fut fondée par Félicien BARRY (1899–1985) en 1949 à une époque où plus aucune revue « wallonne » ne paraissait dans la région de Charleroi. Cet imprimeur amoureux de notre langue régionale avait déjà collaboré à l’édition de Èl Chariguète avant la seconde guerre mondiale et c’est sur le modèle de ce périodique mensuel qu’il allait lancer, avec le soutien d’Henri VAN CUTSEM (1884–1958) et de l’Association littéraire wallonne de Charleroi, une revue particulièrement soignée qui connut, au départ, un grand succès.
Sans bénéficier de subsides, comptant sur la publicité et la vente, il publia de septembre 1949 à juillet 1972, deux cent cinquante et un numéros de èl bourdon.
Prenant de l’âge, atteint par la maladie, il fut heureux de léguer à l’Association littéraire wallonne de Charleroi la charge éditoriale de la revue.
Ce furent Émile LEMPEREUR (1919–2009) et Armand DELTENRE (1924–2005) qui firent paraître celle-ci, dans un format plus réduit et avec une iconographie moins abondante, de janvier 1973 à décembre 1976. À partir du numéro 292 (janvier 1977), ce fut Émile LEMPEREUR qui assuma seul la tâche.
La revue fut alors polycopiée et, si son contenu ne méritait que des éloges, elle présenta jusqu’en décembre 1984 un aspect fort « artisanal ».
En janvier 1985, èl bourdon changea à nouveau de format, passant au A5 ; il fut photocopié jusqu’en juin 1989 puis, toujours dans ce même format, imprimé dès septembre 1989.
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À partir du numéro de novembre 1999, la couleur se généralisa sur les couvertures et dans le numéro 522 de janvier 2000, Mésse Coq et Coquia faisaient leur apparition ; les dessins étant dus à Jacques RAES et les textes à Jean-Luc FAUCONNIER.
En 2004, l’Association littéraire wallonne de Charleroi et les Scrîveûs du Centre décidèrent de fusionner èl bourdon et Èl Mouchon d’Aunia. En d’autres termes, sous deux couvertures spécifiques, les lecteurs retrouvaient le même contenu.
En janvier 2007, une troisième « couverture » voyait le jour, A no boutique, qui permit d’accueillir des textes picards. La publication, sous cette forme « couvrait » ainsi toute l’aire du picard hennuyer ainsi que celle du wallon occidental.
En 2012, les Scriveûs du Centre ont émis le souhait de mettre fin à la « fusion » et ils ont décidé de faire paraître séparément Èl Mochon d’Aunia. Quelques temps après, la décision fut prise de supprimer la couverture A no boutique ; néanmoins, èl bourdon a continué à publier des textes picards, fidèle à une tradition qui remontait aux premières livraisons de la revue.
Depuis lors, mois après mois, èl bourdon continue à zûnér ; le nombre d’abonnés reste relativement constant et il est évident que sans les subsides « officiels » – de la Ville de Charleroi et surtout de la Fédération Wallonie-Bruxelles – il aurait cessé de voler depuis longtemps.
Certains ont suggéré d’abandonner le « papier » pour passer à une version diffusée sur la toile ; l’équipe éditoriale de la revue ne veut pas tourner le dos à la modernité mais il semble que cet abandon constituerait, en fait, une trahison, une rupture d’une longue tradition. Il n’empêche que l’existence de deux versions est envisageable mais là, c’est une question de « ressources humaines » qui se pose, et elle n’est pas près d’être résolue.
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Dans ce numéro 700-701 – un numéro double pour la circonstance – on fera le tour des numéros jubilaires en reproduisant certains articles de tête ainsi que quelques textes à caractère littéraire contenus dans ceux-ci. C’est en fait une ballade butinante à travers les milliers de pages de la revue qui mettra en valeur quelques-uns de ceux qui ont fait èl bourdon, c’est à dire ceux qui usent d’une langue régionale comme outil littéraire.
Le numéro 100
La couverture de ce numéro en date de décembre 1957, est illustrée d’une photo qui porte comme légende : « In djeu d’ côtes, ène boune crasse pinte, èyèt ène pupe di vî toubac´… »
En fait, il s’agit d’une photo célèbre qui représente un cercle « ornithologique », Lès pièrotisses (circa 1869) qui rassemble devant une table les membres de ce cercle – DAUBRESSE, François MICHE, Philippe DENEILLE, DEVENTER, Petrus FLAMENT et DAVIDIA – en train de jouer aux cartes et de se désaltérer.
L’éditeur du périodique s’ancrait par-là dans un « âge d’or » qui était celui de Jacques BERTRAND (1817–1884) durant la seconde partie du XIXième siècle.
L’article de tête, signé Félicien BARRY, fait l’éloge de tous ceux qui sont abonnés à la revue et de tous les scrîjeûs qui y collaborent. Il évoque aussi un Livre d’or qui doit paraître à l’occasion du dixième anniversaire de èl bourdon, fondé en 1949, et du cinquantième anniversaire de l’Association littéraire wallonne de Charleroi, fondée en 1908.
Le « Livre d’or » paraîtra en 1958 sous le titre de 270 écrivains dialectaux du Pays Noir, volume abondamment illustré et qui demeure un ouvrage extrêmement précieux. Faut-il dire qu’il nécessita un énorme travail préparatoire qui fut assuré par le Mésse Bourdon, Félicien BARRY.
Dans ce même numéro 100, figurent une série de textes littéraires, des articles concernant l’histoire de la littérature wallonne, des informations de tous ordres ainsi que les tables de l’année 1957.
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Nous reproduisons deux textes qui parurent dans cette livraison. Songe, mensonge... est de la plume de George FAY (1899–1986) qui avec beaucoup d’humour fait état des plaintes de Félicien BARRY qui se sentait – à juste titre –, abandonné par tous ceux qui auraient pu l’aider et qui, néanmoins, réussit à sortir son centième bourdon.
L’autre texte, Souvenances, est une « chanson monologue » du Baron d’ Fleûru, alias Henri PÉTREZ (1886–1967) qui était un intime de Félicien BARRY et aussi un fidèle de la revue. Il s’agit d’un texte tout empli de nostalgie tel que le fabuliste avait coutume d’en rédiger à la fin de sa vie ; on peut même considérer qu’il s’agit d’une espèce de testament particulièrement émouvant.
Parmi les nouvelles figurant dans ce même numéro, pour la plupart recueillies par l’inlassable Mésse Bourdon, figure un portrait de François CHERMANNE (1927–2017), un des piliers du Cercle wallon de Couillet – il vient de nous quitter – qui tenait, alors le rôle de Zozi dans l’opérette de George FAY, Mimîye.
© Comité de rédaction èl bourdon, janvier 2018