Un auteur, une voix... 2023
Jean-Luc Fauconnier
Texte
La fin de l’année arrive avec ses fêtes traditionnelles, mais aussi, pour tous ceux qui apprécient les langues régionales en nos régions, ce qui constitue aussi pour eux une fête depuis des années, Un auteur, une voix.
On connaît le principe de cette manifestation littéraire: un interprète défend un texte d’un auteur en langue régionale devant le public rassemblé à La Roulotte théâtrale à Élouges et aussi, devant deux jurys, l’un destiné à juger l’interprétation, l’autre la qualité du texte.
Les infatigables organisateurs de cette manifestation, Annie Rak et Roland Thibeau avaient proposé cette année comme thème, Les Voisins.
*
On l’a déjà fait remarquer, certains auteurs wallons n’aiment pas voyager, le «campanilisme réducteur», cher à Albert Maquet, les confine à leur cocon et pour eux, Élouges c’est bien loin, quasiment le pays rouchi, le bout de Wallonie, la France, presque!
Cette année, il semble que certains se soient rendu compte que la «politique de la chaise vide et le repli frileux» étaient dommageables et, c’est ainsi qu’à côté d’une majorité de textes en langue picarde, on a eu l’occasion d’entendre des textes littéraires en wallon.
On ajoutera encore que toutes les langues régionales de la Fédération Wallonie-Bruxelles sont les bienvenues à La Roulotte théâtrale, qu’elles relèvent du domaine roman ou encore du domaine germanique.
C’est ainsi que lors de l’édition 2018, Léo Wintgens a été récompensé d’une mention pour son interprétation d’une prose en francique de François Hicq, De man é-je Kasschot béj de Naatsts, le texte lui-même bénéficiant lui aussi d’une mention.
*
Cette année encore le monde des diseurs et le monde des auteurs – des microcosmes qui se rencontrent trop rarement – ont coopéré pour le plus grand bien de la littérature «en langues régionales».
Comme à l’accoutumée, on entend des auteurs qui se muent en interprète et l’inverse est aussi de mise dans une forme d’échanges autant fraternels que sympathiques.
Pour ce qui concerne l’édition 2023, les spectateurs qui suivent fidèlement la manifestation, ont pu constater qu’ils avaient affaire plus fréquemment que par la passé à des interprètes qui avaient pris la peine de mémoriser le texte qu’ils défendaient – ce qui constitue un gage de qualité en la matière – certains ont même soigné particulièrement leur «mise en scène» et cela, sans verser dans un excès de dramatisation. Ce ne peut-être que bénéfique pour les textes des auteurs.
*
Le jury Interprète, composé de Gwennaellle Cappelin, Christine Mordant, Michel Robert et Rolant Thibeau, a couronné, en ex aequo,
Jacques Sartiaux qui défendait un texte en picard de Boussu de Renild Thibaut, Em´ visène i sét compter,
et
Sébastien Mancinelli qui interprétait une prose en wallon d’Oupéye de Gilles Valoir, Li Camping dè Coqueret.
Par ailleurs, le même jury a décerné des mentions à Véronique Dubois, à Nathalie Risselin et à Daniel Henkinet.
*
Le jury Auteur composé de Jean-Luc Fauconnier, Michèle Herlin, Jean-Marie Kajdanski et Julien Noël a, pour sa part, primé, ex æquo,
Anne Blampain, pour son texte en wallon de Marcinelle, Lès djins dès tiènes
et
Régis Hespel, pour une prose en picard tournaisien, Raminvrance d’ voisnache.
Deux textes différents qui s’inscrivaient pourtant fort bien dans la thématique de l’année. Celui d’Anne Blampain – qui est bien connue des lecteurs de ce périodique – a mis en exergue la solidarité des agriculteurs lors de la moisson.
Quant à Régis Hespel il a évoqué le souvenir impérissable d’une voisine qu’il avait aperçue en tenue légère et cela, avec autant d’humour que de tact.
Nous aurons l’occasion de publier dans la prochaine livraison de èl bourdon les deux textes qui ont remporté la catégorie Auteur.
*
Le rendez-vous est pris pour 2024 et les organisateurs ont l’intention d’avancer dans l’année la date de la manifestation. Quoi qu’il en soit, merci à eux de la perpétuer.
© Jean-Luc Fauconnier, revue èl bourdon, 4e trim. 2023, Charleroi